Sidérurgies, sidérurgistes et reconverisons de sites industriels

in #siderurgie7 years ago

--> écrit initialement en 2012

Plus en Lorraine, plus au Luxembourg ? plus en Allemagne ? (SarLorLux) Et si il y avait moins ou plus de demande tout simplement ?Et si la baisse de demande suivait celle de la construction ?Et si plutôt que de pleurer pour maintenir des gens en place, alors qu'il n'y a plus de demande (la production est partie dans des pays où la main d'oeuvre ne coute rien) on prenait les devants pour se reconvertir, laisser les world companies faire leur business entre elles et aller chercher le boulot ailleurs, là où il se trouve ?
Ah ouais, c'est sûr que pour ça, faut se 1) se sortir les doigts du cul 2) accepter de gagner moins de 2000 € nets par mois mais beaucoup émargent à plus de 4000 3) bouger ailleurs.

Pour la question des salaires, un petit éclaircissement s'impose : pour une raison que j'ignore totalement, lorsque je pratiquais les arts martiaux, alors que je résidais encore à Metz, c'était toujours avec des sidérurgistes... (pourquoi, sais pas, mais c'est garanti sur facture), ils avaient des tas de raisons valables de se plaindre (particulièrement de la chaleur, on s'en serait douté), je ne les ai jamais entendu se plaindre de la paye,  à ce sujet, j'ai toujours eu du mal à les croire d'ailleurs, et à trouver la motivation nécessaire pour entreprendre, et puis continuer des études. C'est sûr, depuis, les choses ont peut être changé (j'ai quitté Metz en 1987, ça fait un bail), mais par mes pérégrinations Lyonnaises et Marseillaises j'ai bien connu des situations comparables à défaut d'être superposables : l'ouvrier en chaîne de production chimique, l'ouvrier métallurgiste aluminium en région Rhône Alpes et le docker Marseillais. C'est sûr, aucun des deux ne se réveille le matin à moins de 2500 net, et la réalité est plus proche des 4000, attention, je parle de revenus nets, le salaire ne représente en fait qu'une faible proportion de ces sommes, le reste c'est des primes (3/8, risque, pénibilité, heures sup, que sais-je encore, si je trouve ces primes justifiées, oui, parfaitement, ne me faites pas dire ce que je n'ai pas dit). C'est pour ça qu'ils ont la hargne, et sans doute à juste titre. Pour la valeur absolue des revenus, ben ouais, c'est élevé, mais compte tenu du boulot à fournir, ça fait partie de la motivation se se lever le matin. D'ailleurs, je n'en ai jamais connu qui aient été mécontents de leur job (fatigués, oui, ont eu chaud, oui, cadences, oui, etc... mais mécontents, non, jamais, ces types aimaient leur boulot). C'est d'ailleurs pour ça que la banque leur a prêté si facilement pour l'achat de leur maison (ces banquiers ne voient jamais plus loin que le bout du nez des autres) . C'est aussi pour cela qu'ils ne sont pas si nombreux que ça, je parle des sidérurgistes. Ce point n'est jamais évoqué dans les médias, c'est dommage car il y a beaucoup à dire à ce sujet. Mais les Français, les questions d'argent, c'est tabou, faut pas en parler.

La sidérurgie c'est du passé, depuis les années 70 elle n'en finit pas de mourir (ayant vécu 21 ans à Metz, j'en ai entendu des tas des histoires à ce sujet, mais en fait, c'était toujours la même), faut se rendre à l'évidence, depuis que je suis ado on passe d'un plan social à un autre, Florange n'est que le dernier de la liste. Tout en faisant des trop longues études à Nancy, j'ai eu le privilège d'assister à la déconstruction totale du site sidérurgique de Pompey, il n'en subsiste à l'heure actuelle que deux gros blocs de fonte et une plaque (le métrolor que j'empruntais tous les WE à cette époque traversait ce site). Au début de mes études Nancéiennes, en 1987, le site fonctionnait encore à plein régime (ça puait, ça fumait, et ça faisait un bruit infernal, oui, mais des gens y travaillaient, et en vivaient. Je me rapelle que certains jours, je devais retenir mon souffle juste avant d'entrer dans la gare de Pont à Mousson en venant de Nancy tellement que ça daubait). Le père d'un copain d'enfance y a travaillé (à Pompey) comme ingénieur, ....libéral... Oui, il n'en était même pas salarié... Ca existait encore ce mode de travail en ce temps là, à cet endroit. Puis, forcément il y a perdu ses consultations, et tout le reste, ça a été la première victime que j'ai connu de tout ça, je ne sais même plus en quelle année c'était... Début 80 je crois, ça m'a marqué. L'outil de production date des années 50, il est dépassé techniquement et plus aux normes, principalement économiques d'ailleurs, c'est moins cher au Belouchistan, transport compris. Et puis, a t'on vraiment besoin de tant d'acier ? Pourquoi faire au juste ? Ca sert à quoi l'acier en 2012 ? à la construction ? Mais justement, l'immobilier neuf est en crise.. Faut il continuer à produire alors qu'il n'y a plus de demande ? C'est pas maintenant qu'un ministre du redressement productif va pouvoir y faire quelque chose, fallait moderniser l'outil, les méthodes et les mentalités dans les années 80 quand il était encore temps. Maintenant, ça fait pompier comme attitude, mais on dirait que le pompier de service ne se rend même pas compte que tout a brulé, et que ça continue à bruler dans tous les coins, et que ce sont ses prédécesseurs qui ont foutu le feu (tous ses prédécesseurs, d'ailleurs, à droite comme à gauche, et surtout au centre)

Ou alors reconvertir, c'est ce qu'avait très bien compris Kiffer à Amnéville, la preuve que c'est possible, même en France, et même en Lorraine, Kiffer, avec tous ses défauts avait au moins compris une chose essentielle : "il existe quelque chose au delà de la frontière Luxembourgeoise, également, aussi surprenant que cela puisse paraître, il existe aussi quelque chose au delà de la frontière Allemande". Se bouger le cul à défaut de s'en sortir les doigts, évoluer s'adapter, se former sont des notions qui sont ne sont pas dans les programmes éducatifs Français, et encore moins dans les mentalités, ça manque. Accepter que les acquis sociaux puissent être valables à une époque mais pas forcément autant à une autre aussi, ça manque, au risque de voir l'outil de production déménager à un endroit où il n'y a tout simplement pas d'acquis sociaux du tout. Ou tout simplement fermer boutique.

Ah, oui, fais à ton ennemi ce que tu n'aimerais pas qu'il te fasse disait Maître Hiamuri. T'es pas content de ton patron, change de job. Tu penses que ton boss va te licencier ? accepte vite, tant qu'il reste des sous dans la boite. Ton secteur d'activité est en perte de vitesse, fuis vite. Ainsi parlait Maître Hiamuri
Le système dans lequel on vit est fait pour, et ne peut fonctionner que si ce sont les entreprises qui financent l'état par le biais de taxes diverses et variées. Si c'est l'état qui doit financer les entreprises, c'est qu'il doit y avoir un fil qui fait masse quelque part disait Maître Hiamuri avant d'entreprendre l'ascension du mont Fuji Yama

Tu veux que l'on évoque l'attitude des cadres Mittal en Sarre ? (pour les lecteurs extérieurs pas encore couchés à cette heure, la Sarre est la région Allemande mitoyenne à la Lorraine et au Luxembourg)
Attention à ne pas se méprendre sur mes derniers propos, je me suis peut être mal exprimé, en fait, j'adorais passer par là, malgré la puanteur, le bruit et la fumée, ça me fascinait, on voyait sur les murs des éclats de lumière jaune/orange dont l'origine était de la fonte en fusion...
La poussière aussi, je me rappelle également de la région Hagondange/Amnéville, à l'époque où "ça" fonctionnait encore, je parle de la filière "chaud" (très chaud, même). Il y avait à cet endroit un convertisseur Bessemer, une espèce de truc monstrueux qui a pour effet de transformer directement la fonte en acier en injectant de l'oxygène sous pression directement dans la fonte en fusion. Ca faisait un vacarme de fin du monde et avait pour conséquence de recouvrir toute la région d'une couche épaisse de poussière orange.... Surréaliste !
Ceci étant, la reconversion par les loisirs est risquée certes car monocentrique, mais elle a le mérite d'exister. C'est vrai qu'en ces temps troublés le loisir et le tourisme ne sont pas forcément au beau fixe.. Mais bon, je salue l'initiative.. Il est vrai néanmoins que la création du centre de loisir d'Amnéville les Thermes est consécutive au premier choc industriel/sidérurgique de la fin des années 70. Il est peut être temps de songer à reconvertir cette reconversion, ben ouais, on est en 2012, ou à la faire évoluer. Il faudrait peut être pour cela un deuxième Kiffer...
Mais si ce n'était que la sidérurgie Lorraine...
J'ai aussi suivi de plus ou moins près la reconversion des anciens sites chimiques de la presque Ile de Lyon en une espèce de paradis pour les agents immobiliers en quête de bobos pigeons.
Ah, et puis, le grand port maritime de Marseille... Houlà, du grand art dans l'immobilisme de ses futurs anciens employés (à deux sur un poste à 4000€/mois chacun, semaine de 4 jours, passons le reste, on n'en est plus à ça près)
Ah, et puis, les chantiers navals de la Ciotat, je suis arrivé très longtemps après la bataille, mais les témoignages que j'en ai recueillis... ne sont pas vraiment élogieux (un site industriel exceptionnel au début, qui a été littéralement tué par ses propres employés, totalement abandonné actuellement, entouré et assiégé par des promoteurs immobiliers la bave aux lèvres (le site est magnifique))
Bon ben voilà, depuis le mois de Juin, je travaille à la plaine Saint Denis... Boarf.. je connais l'histoire, toujours la même.La reconversion semble bien partie, création d'un quartier d'affaires pour désengorger la défense.. Sur les rails, dirons nous. Mais il y a du boulot, seule la zône située autour du stade de France est reconvertie, plutôt bien d'ailleurs (c'est justement là que se trouve mon actuel employeur, qui n'est pas le stade de France, je tiens à le préciser, que voulez vous que je fasse dans un stade..), mais autour de cette zône, c'est la plaine, et Saint Denis.. Des hectares de friches industrielles. Pourvu que les pouvoirs publics pensent à l'emploi, et à la reconversion de ces sites anciennement industriels au lieu de ne penser que logement et taxe d'habitation, faut commencer à réfléchir à long terme maintenant.