Edward Snowden, le lanceur d’alerte qui a dénoncé la surveillance de masse de la NSA, l’a réitéré sur Twitter il y a peu : ceux qui prétendent n’avoir rien à cacher et qui sont donc d’accord sur le principe de collecte de données personnelles (que ce soit par le gouvernement ou par les entreprises d’ailleurs) n’ont rien compris aux véritables enjeux de cette pratique.
L’enjeu premier est le pouvoir, le contrôle. C’est à cette même conclusion qu’aboutissent les réflexions des experts interviewés dans le documentaire de Marc Meillassoux, disponible sous licence CC-BY-NC-ND. Parmi les intervenants, William Binney, ex-directeur technique de la NSA, affirme que le système de collecte de données développé par l’agence américaine aurait été pour la Stasi « un rêve devenu réalité ». Thomas Drake, ancien analyste de l’armée américaine, déclare que les démocraties occidentales d’aujourd’hui telles que les États-Unis ou l’Allemagne ne sont pas des États policiers, « mais les mécanismes et les instruments du pouvoir pour y mener sont déjà tous en place. » Or en tant qu’État, la tentation d’abuser de ce pouvoir est grande. L’Histoire ne manque d’exemples qui prouvent que « des instruments comme la surveillance se retourne[nt éventuellement] contre le peuple. »
Jérémie Zimmerman, hacker et cofondateur de la Quadrature du Net, souligne que dans la pratique, la logique du « rien à cacher » entraîne une situation dans laquelle « les individus [sont changés] en sujets qui acceptent le contrôle, qui acceptent la domination, qui acceptent la servitude. » Ainsi, la simple menace permanente que représente cette surveillance omnipotente a pour conséquence la « stagnation de la société » dans la mesure où elle inhibe nos comportements, notre liberté d’expression. Bref, cette surveillance est un outil de contrôle idéal, d’autant plus qu’à l’heure actuelle, nous sommes tous très coopérants quant au partage de notre profil et de nos activités numériques, qui ne sont finalement que le reflet de notre identité irl.
Réfléchissons un instant. On a beau n’avoir rien à cacher, accepterions-nous pour autant qu’une nanocaméra montée sur drone miniature enregistre nos moindres faits et gestes 24H/24 ? C’est un peu ce qui nous attend si l’on s’obstine à laisser faire. Serions-nous donc les complices de notre propre asservissement ? Et si c’est le cas, pouvons-nous y faire quelque chose ? Des débuts de réponses dans ce documentaire essentiel pour comprendre le fond du problème que représente cette violation de notre droit à la protection de la vie privée.
Pour suivre l’actualité du documentaire : https://nothingtohidedoc.wordpress.com/
Photo by Goh Rhy Yan on Unsplash